Synode sur l’Amazonie, les évêques veulent donner plus de pouvoir aux femmes
En salle de presse du Saint-Siège, mercredi 23 octobre, les intervenants ont souligné que les femmes dans l’Église, bien que majoritaires, restent trop peu visibles dans les lieux décisionnels.
Le point presse de mi-journée au Vatican, en ces semaines du Synode sur l’Amazonie qui se déroule jusqu’au dimanche 27 octobre, a porté mercredi 23 octobre sur la place et le rôle des femmes dans l’Église.
« La place des femmes est une question de mentalité et nous avons tous besoin de changer nos mentalités pour qu’il y ait une vraie équité », a lancé d’emblée Mgr Ricardo Ernesto Centellas
Guzman, évêque de Potosi et président de la Conférence épiscopale de Bolivie. Or cette équité, pour être mise en place, selon lui, ne doit pas « attendre une indication du Vatican », mais
doit d’ores et déjà « commencer au niveau des paroisses et diocèses » pour permettre aux femmes de participer aux décisions. « Il n’est pas normal, a insisté Mgr Guzman, que les femmes soient
majoritaires dans la pastorale de l’Église et qu’elles soient presque invisibles dans ses processus décisionnels. »
Des conseils pastoraux délibératifs
Interrogé sur les changements concrets que le Synode pourrait proposer sur ce plan, l’évêque de Potosi a considéré que ce Synode sur l’Amazonie « peut changer le contexte », dans la mesure où
il a fait mieux prendre conscience que « nos structures ecclésiales ont été conçues de manière à ce que seules quelques personnes prennent les décisions ».
Citant en exemple les conseils pastoraux mis en place dans un grand nombre de paroisses, Mgr Guzman a proposé que ces conseils ne soient plus seulement consultatifs, comme c’est
majoritairement le cas aujourd’hui : « rien n’empêche qu’ils soient également délibératifs ! ». Une Église synodale signifie non seulement « marcher ensemble » mais aussi « décider ensemble,
au risque sinon de boiter », a-t-il encore souligné. D’où l’urgence, selon lui, de « reconnaître aux femmes un pouvoir décisionnel».
Au Synode sur l’Amazonie, les évêques dénoncent une vie occidentale « luxueuse »
C’est également à partir de la synodalité que le père Zenildo Lima da Silva, recteur du séminaire interdiocésain São José à Manaus (qui accueille plus de 500 séminaristes, dont quelques
indigènes) et vice-président de l'organisation des séminaires du Brésil, a invité à repenser la formation des futurs prêtres. Pour changer l’image et la gouvernance d’une Église masculine,
a-t-il fait remarquer en substance, il faudrait davantage prendre en compte que « les capacités pastorales de l'Église sont principalement les fruits de la sensibilité féminine ».
Exploiter toutes les possibilités
« Du point de vue du droit canonique, on peut faire beaucoup plus que ce que l’on fait », a affirmé avec vigueur le cardinal Oswald Gracias, archevêque de Bombay (Inde) et membre du C6 (le
conseil des six cardinaux chargé par le pape de le conseiller dans la réforme de la Curie). Tout en rappelant que les femmes ne peuvent pas dire la messe, entendre en confession ou
administrer la confirmation, « elles peuvent faire pratiquement tout le reste », a-t-il déclaré. « Les femmes peuvent même être responsable d’une paroisse et présider un tribunal
ecclésiastique conformément à la loi de l'Église. »
« Nous devons exploiter bien plus toutes ces possibilités », a-t-il ajouté, notant que le pape François « souhaite beaucoup la décentralisation de l’Église ». Et que pour cela, les évêques
sont invités à promulguer des changements « là où ils peuvent déjà le faire sans l'autorisation du Saint-Siège » en vue de laisser plus de pouvoir aux femmes.
Au Synode sur l’Amazonie, la voix des femmes se fait entendre. Enfin, répondant à une question, soeur Roselei Bertoldo a également souligné l'importance de la participation des femmes à
l’évangélisation – « à leur manière » – et a appelé de ses voeux que celles-ci puissent accéder à la prise de décision. « Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour arriver à la
reconnaissance de notre présence telle qu’on la réclame en vue de devenir davantage acteur de l’Église », a constaté cette religieuse du Coeur Immaculé de Marie, fondatrice du réseau « Un cri
pour la vie » qui
lutte contre la traite au Brésil, en particulier auprès des femmes et fillettes indigènes qui, sous prétexte d’une invitation à étudier en ville, se retrouvent souvent « piégées comme
esclaves domestiques ou sexuelles ».
Selon soeur Roselei, « ce Synode commence à entreprendre ce chemin », ne serait-ce qu’avec la participation remarquée de 35 femmes, puisque c’est la première fois que les femmes sont si
nombreuses à un Synode romain.
Claire Lesegretain