Le message de Noël
de l’évêque de Quimper
et Léon
Ouest-France lundi 23 décembre 2019 (29D06)
L’évêque de Quimper et Léon, Monseigneur Laurent Dognin, délivre son message de Noël et évoque, notamment, le climat social tendu dans le pays.
L’an passé, à pareille époque, nous étions en pleine crise des Gilets jaunes. La question était de savoir si l’on pouvait, malgré cela, fêter Noël dans la joie. Vous
répondiez oui. Qu’en est-il cette année alors que la situation sociale reste tendue dans le pays ?
J’ai le sentiment que, cette année, la situation n’est pas la même. En ce moment, c’est tendu du fait de l’histoire des retraites. Mais derrière les retraites, pour les gens il y a une vraie appréhension de l’avenir, qu’il soit professionnel ou familial. Les gens manifestent autant pour la retraite de leurs enfants que pour la leur. On sent une tension. Je pense que dans cette situation, Noël peut être un moment favorable.
Justement, quel est votre message pour Noël cette année ?
Cette année, je veux insister sur la crèche. Quand on la regarde, on comprend ce qu’est Noël. L’enfant qui est là, il n’est pas comme les autres. C’est Jésus, le fils de Dieu qui vient se faire Homme parmi les Hommes. La crèche n’est pas un palais : c’est une étable. L’enfant qui est né a été allongé dans une mangeoire pour animaux. Ça nous montre que le seigneur est venu pour chercher tous les Hommes. Que tout le monde peut être touché par la joie de Noël. Personne n’est exclu.
Tout cela se passe dans une nuit, qui peut représenter nos épreuves personnelles et collectives, nos inquiétudes quant à l’avenir. Mais cette nuit de Noël est lumineuse. Jésus est né et, au fond, sa lumière nous aide à garder l’espérance et nous permet de tenir debout, de ne pas baisser les bras. Noël n’est pas un bonheur éphémère, contrairement à ce que l’aspect commercial veut nous faire croire. Le message qui nous est donné est plus profond. Et c’est sans doute ça qui fait que les églises sont remplies à ce moment de l’année.
Dans plusieurs paroisses, pour contrer la baisse du nombre de prêtres, on a décidé de baisser le nombre de messes chaque week-end. Comment vous positionnez-vous face à cela ?
Il y a effectivement une baisse du nombre de prêtres. Mais il n’y a pas que ça : il y a surtout une baisse du nombre de fidèles. Il faut que l’on adapte le nombre de messes au nombre de personnes dans l’église. Par exemple, à Noël, on sait que les églises vont être pleines. Donc on multiplie le nombre de messes, comme l’été avec les vacanciers. Le reste du temps, on diminue le nombre d’offices car ils sont moins nombreux et on essaye de les rassembler au maximum.
Certains fidèles des zones rurales se plaignent : désormais, les messes se déroulent davantage dans les villes et moins dans les villages. Autrefois, les gens ont été habitués à avoir la messe, chez eux, dans leur village.
Aujourd’hui, les gens circulent tout le temps. Pour aller à la messe, il faut prendre sa voiture, c’est inévitable. On la prend bien pour faire ses courses ! C’est le mode de vie qui a changé […]. Il y a toujours un effet de « ville-centre » dans une grande paroisse. C’est un peu le même phénomène que pour les intercommunalités ou les communes nouvelles : on rassemble nos forces.
Vous le disiez, chaque année à Noël, les églises sont remplies. Pourquoi à ce moment-là et pas le reste de l’année ?
Ce phénomène est très compliqué à expliquer. On aimerait bien que les gens soient davantage fidèles tout au long de l’année, même les dimanches ordinaires. Mais ça, ça nous échappe. C’est déjà merveilleux de voir tant de monde dans les églises à Noël. Des paillettes, de la lumière dans les rues, ça ne suffit pas. J’ai déjà rencontré des personnes qui ont retrouvé la foi durant la nuit de Noël. L’une d’elles sortait de trente ans d’athéisme. Et on l’a vu revenir à l’église tous les dimanches suivants.
Recueilli par Basile CAILLAUD