La guérison de l’aveugle-né nous rappelle d’autres guérisons faites par Jésus, notamment de Bartimée, le mendiant aveugle de Jéricho. Les évangélistes parlent alors de « miracle ». Jean n’utilise pas le langage de miracle, mais de « SIGNE ». Le miracle manifeste que le Royaume de Dieu est en train de s’accomplir (« les aveugles voient, les boiteux marchent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres… »). Le Signe est une étape vers Pâques, il y en a sept dans l’évangile de Jean, le signe absolu étant la mort et la résurrection du Christ.
La manière dont Jésus procède est surprenante… Il fait de la boue avec sa salive et l’applique sur les yeux de l’aveugle. Cela n’est pas sans rappeler comment Dieu a façonné l’homme. Il a mis son souffle dans la terre pour que Adam (« Homme=humain= « tiré de l’humus, la terre ») soit un être vivant. Plus qu’une guérison, il s’agit d’un acte de création. Jésus vient achever ce que le Père avait commencé. Il ne s’agit pas de « réparer », d’où la question des disciples « est-ce lui ou ses parents qui ont péché ? », mais d’accomplir, de mener à la perfection, ce que le Père a commencé. Et la création parfaite, c’est de reconnaître Jésus avec foi, et d’en témoigner. Celui qui reconnaît Jésus, celui là est enfant du Père !
Le nom de la piscine « Siloé » = « envoyé », indique ce lien entre l’adhésion à Jésus, le « plongeon » dans la foi, et la mission qui en découle.
Le récit est écrit selon une progression où peu à peu l’homme guéri va affirmer sa foi en Jésus. C’est parce qu’il est obligé de prendre position vis-à-vis de sa famille et des autorités
religieuses, qu’il va témoigner de cette foi en Jésus.
- les gens du voisinage ; « l’homme qu’on appelle Jésus, voilà ce qu’il m’a fait… où est-il ? Je n’en sais rien »
- les pharisiens (groupe religieux juifs qui se considèrent comme l’élite de ceux qui respectent la loi, et méprisent les autres…) « Que dis-tu
de celui qui t’a ouvert les yeux ? » - « c’est un prophète »
- Alors que les parents se dégagent de toute prise de position, par peur des pharisiens, l’aveugle guéri leur tient tête : « auriez vous envie de devenir son disciple vous
aussi ? Il est étonnant que vous ne sachiez pas d’où il est ! Si cet homme n’était pas de Dieu, il ne pourrait rien faire. »
- Pour finalement, rejeté de tous, proclamer sa foi en Jésus « L’homme dit : je crois, Seigneur. Et il se prosterna devant lui »
Tandis que l’homme guéri vient peu à peu à la pleine lumière de la foi, les pharisiens s’enferment dans leur aveuglement. En refusant la lumière de Jésus, ils s’enferment dans leur péché.
Dans la nuit de Pâques, nous retrouvons trois éléments forts de ce texte au cours du baptême : L’eau de la piscine, la proclamation de la foi, la lumière reçue du cierge pascal, signe du Christ Ressuscité, lumière plus forte que les ténèbres.
Christian Le Borgne, curé
Illustration : Arcabas, La guérison de l’aveugle