Nous célébrons le troisième dimanche de Pâques : "Comment sortir de nos peurs"
Alors que la joie pascale nous habite et nous anime, notre cœur continue à se bouleverser à cause des mauvaises nouvelles qui nous arrivent au quotidien. Cependant la parole de Dieu nous rejoint même au coeur de nos tourments. C’est pourquoi il nous faut nous maintenir toujours dans la confiance au delà de tout ce qui peut nous contrarier.
Comme nous pouvons tous le constater, le quotidien ne change pas : des cas de covid-19 en augmentation, des enlèvements et prises d'otage des personnes humaines, surtout avec ce qui s'est passé en Haïti dimanche dernier, nos frères de la Société des prêtres de Saint-Jacques, nos sœurs religieuses de la communauté Providence de la Pommeraye et des Petites Sœurs Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et des amis laïcs engagés, victimes de kidnapping par des gangs lourdement armés.
Ces mauvaises nouvelles ne nous laissent pas tranquilles. De la joie pascale, on dirait qu'on est en train d'expérimenter - à notre manière - le drame d’enlèvement de Jésus à Gethsémani. Deux scènes paradoxalement opposés. Nos frères, nos sœurs, nos amis membres d’une seule famille et tant d’autres personnes sont enlevés par des ravisseurs en plein dimanche de la Divine Miséricorde. Alors qu’ils étaient en route pour continuer à célébrer la joie de la résurrection, en prenant part à une cérémonie d’installation d’un ami prêtre nouvellement nommé curé dans une paroisse non loin de Port-au-Prince.
L'inquiétude nous envahit. Nous sommes bouleversés, comme les apôtres, après les événements de la mort de Jésus. Comme les disciples sur le chemin d’Emmaüs, nous sommes déboussolés. Mais de même que le Christ ressuscité les rejoint dans leur souffrance, il nous rejoint nous aussi dans nos misères, nos incertitudes, non pas pour nous empêcher de ressentir la douleur, mais pour nous apporter le réconfort et toucher les coeurs endurcis, nous ouvrir à la grande joie Pascale.
En célébrant le troisième dimanche de Pâques, la liturgie nous amène au soir de la résurrection, au sein de la communauté de Jérusalem. Alors que les marcheurs d'Emmaüs sont en train de raconter leur rencontre avec le Ressuscité (Lc24), soudainement, ce dernier est apparu au milieu d'eux. Comme les femme, le matin de Pâques, les disciples sont " frappées de stupeur et de crainte". En effet, l’évangile de Luc présente de nombreuses ressemblances avec celui de la semaine dernière, relatant l’incrédulité de Thomas (Jn 20) : Jésus qui apparaît commence toujours par souhaiter la paix : « La paix soit avec vous ! », salutation que nous utilisons en début de célébration eucharistique. Les prêtres la reprennent à l’issue de la prière eucharistique : « que la paix du Seigneur soit toujours avec vous ! ».
Dans les deux récits, le Ressuscité invite ensuite à contempler et toucher les marques de la Passion : « Voyez mes mains et mes pieds, c’est bien moi ! » (Lc 24,39). Ce contact avec les plaies du Sauveur provoque la joie des disciples. Depuis, elles sont vénérées comme sources de la Miséricorde.
Dans l’évangile de Jean, Thomas a besoin d’une semaine pour entrer dans la foi ; chez Luc, il s’agit de toute la communauté du Cénacle, qui passe progressivement de la « frayeur et crainte » à la « joie sans oser croire », puis à « l’ouverture des intelligences à la compréhension des Écritures ». Ils n’expriment pas encore leur foi, comme Thomas : ce sera l’objet du livre des Actes des Apôtres, où retentiront de magnifiques professions de foi.
Ecoutons plus attentivement les paroles du Christ ressuscité aux disciples : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d'entre les morts le troisième jour, et qu'en son Nom, en vue de la rémission des péchés, le repentir serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. De cela vous êtes les témoins. » (Lc 24,46-48)
Ainsi, dans nos bouleversements le Christ ressuscité fait de nous tous, en particulier chacun et chacune un témoin. Il a remplacé nos "peurs" en "paix", nos "crainte" en " joie" et nos "doutes" en "confiance": " La paix soit avec vous." Ce mot résonnerait bien en nous aujourd’hui au milieu de nos tourments, de nos peurs. Ces mots d'espérance du Ressuscité nous invitent à nous tourner vers le ciel, à compter sur le Vivant, même lorsque les aléas de la vie nous bouleversent. Car le Ressuscité, aux jours de joie ou de détresse, marche avec nous comme les deux disciples d'Emmaüs. Lui qui mange le poisson grillé de ses apôtres est solidaire de notre humanité bousculée.
Nous prions pour que, durant ces jours de Pâques, nous puissions non seulement ressentir la manifestation du Christ ressuscité dans notre vie, mais également recevoir sa paix dans notre cœur et dans notre monde.
Qu'il nous donne de vivre en ressuscités en vue de la construction d’un monde nouveau où la paix, la joie, le bonheur sont vraiment au rendez-vous !
Père Jean-Doret JULIEN, PSJ