Bouleversés et résolus
Message des évêques de France
Chers frères et sœurs,
Réunis en Assemblée plénière à Lourdes, nous avons entendu la stupéfaction, la colère,
la tristesse, le découragement suscités
par ce que nous apprenons au sujet de Mgr Michel Santier, ancien évêque de Luçon puis de Créteil, et maintenant au sujet de Mgr Jean-Pierre Ricard, ancien archevêque de Montpellier puis de Bordeaux.
Nous sommes conscients que ces révélations
affectent douloureusement les personnes victimes, en particulier celles qui
avaient choisi de nous faire confiance. Nous constatons l’ébranlement de nombreux fidèles, de prêtres, de diacres, de personnes consacrées. Ces sentiments sont
également les nôtres. Membres d’un même corps ecclésial, nous sommes nous aussi
blessés, atteints en profondeur.
Dans le cas de Michel Santier, nous avons
vivement conscience des responsabilités qui nous reviennent et nous avons travaillé pendant notre Assemblée à identifier les dysfonctionnements et les erreurs qui ont mené à une situation choquante pour tous.
Certains ont pu se demander si le droit de
l’Église n’organisait pas une forme d’impunité ou de
traitement particulier des évêques. Ils
pensent, à juste titre, que la
responsabilité épiscopale renforce chez ceux qui l’exercent le devoir de droiture et la légitime exigence des fidèles comme de l’institution ecclésiale. Nous le redisons avec force : il n’y a pas, et il ne peut pas y avoir,
d’impunité des évêques.
En raison même de la nature de leur charge
apostolique, les évêques dépendent directement du Saint-Siège. Les procédures qui les concernent sont plus complexes et prennent davantage
de temps. Nous nous engageons à
travailler avec le Saint-Siège aux clarifications et aux simplifications qui s’imposent. Nous avons
décidé de mettre en place un
Conseil de suivi qui nous permettra de ne pas affronter seuls et entre nous
ces situations.
Certains s’interrogent : dans les circonstances
présentes, quel crédit donner aux engagements pris il y a un an pour
tirer les conséquences du rapport de la CIASE ? Nous pouvons en donner l’assurance : une transformation des pratiques est bel et bien en cours, avec
l’aide de nombreux fidèles laïcs particulièrement qualifiés, dont des personnes victimes. Des décisions sont
déjà prises et mises en œuvre. Diocèses et mouvements d’Église
s’impliquent de manière plus construite dans
la protection des mineurs. Les groupes de travail décidés il y a un an
rendront leurs conclusions en mars 2023. Nous venons de faire un point d’étape avec eux au cours de cette Assemblée. Ce travail de fond commence
à porter du fruit. Nous continuerons sur cette
lancée.
Une autre question habitait nos cœurs au début de l’Assemblée plénière : y a-t-il, y aura-t-il d’autres affaires de ce genre ? La condition humaine étant ce qu’elle
est, nul n’est à l’abri de fautes graves
et dramatiques. Mais nous pouvons et nous
voulons renforcer dans l’Église
les processus qui les limitent au maximum et
les traitent adéquatement quand elles
surviennent.
Dans ce contexte, le communiqué du
Cardinal Jean-Pierre Ricard nous a tous bouleversés. Son initiative
de révéler lui-même un fait grave de son passé est important. Nous avons mentionné l’ensemble des situations que nous connaissons. Elles concernent des évêques qui ne sont
plus en fonction. Elles ont toutes fait l’objet d’un traitement judiciaire.
Frères et sœurs, humblement mais de tout cœur,
nous continuons le travail entrepris pour que l’Église
soit une maison plus sûre. Les personnes victimes demeurent plus que
jamais au cœur de notre attention. Vos attentes et vos exigences sont légitimes et vraiment entendues. Nous les accueillons comme venant du Seigneur lui-même. C’est tous ensemble, nous en avons conscience, que nous pouvons contribuer à une fidélité renouvelée à l’Évangile. Telle est notre détermination résolue. Telle
est notre humble prière.
A Lourdes, le 8 novembre
2022